Jean-Yves Nau Dans un entretien à Slate.fr, le médecin qui a démontré l’efficacité du baclofène contre la dépendance à l’alcool accuse désormais spécialistes et pouvoirs publics français de bloquer son utilisation.

L’affaire du baclofène? C’est l’histoire, récente, d’un vieux médicament et d’un médecin souffrant d’alcoolisme. Une histoire peu banale, aujourd’hui au centre d’une vive controverse. Elle commence par la découverte par un praticien franco-américain spécialiste de cardiologie –le Pr Olivier Ameisen– de ce médicament devenu générique et prescrit depuis près de quarante ans comme «relaxant musculaire» chez des personnes souffrant de spasmes musculaires bénins d’origine neurologique. Un essai clinique, dirigé par le professeur Philippe Jaury, devrait commencer en septembre à la faculté de médecine René-Descartes de Paris.

Quelques observations faites outre-Atlantique avaient laissé penser que cette substance pouvait aussi être utile dans le sevrage alcoolique. Il y a sept ans, le Pr Ameisen, qui souffrait alors d’une très forte dépendance à l’alcool, décide de se lancer dans une auto-expérimentation à hautes doses (entre 100 et 300 mg par jour).

Dès 2004, l’une des plus importantes revues médicales spécialisée publie son expérience. Dans la communauté scientifique spécialisée française, il ne rencontre que peu d’échos, à l’inverse des universités anglo-saxonnes. Il propose d’emblée des essais cliniques pour tester son nouveau modèle thérapeutique. En vain.

Le médecin choisit dès lors de s’adresser au plus grand nombre en publiant –c’était en octobre 2008— Le Dernier Verre. Il raconte là ses origines, son parcours dérivant vers l’alcool, l’impasse mortelle dans laquelle il était; puis son retour à la vie, libéré de son addiction.

Cet ouvrage rencontre très vite une large audience chez les personnes alcooliques. Mais les professionnels français de la prise en charge de cette dépendance ne goûte guère l’enthousiasme trop communicatif de leur confrère, sa notoriété médiatique et cette histoire trop miraculeuse pour être honnête.

Peu après la parution de l’ouvrage les responsables de l’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (Anpaa) préconisent de lancer sans délai une étude clinique pour apprécier l’éventuelle utilité du baclofène.

Alcoolisme pourquoi un médicament est il interdit d’utilisation en France